DÉVELOPPER UTILE: jeu numérique responsable

Ce projet a démarré par le désir de NWX d’aider les entreprises, les collectivités et les étudiants à agir facilement pour un numérique responsable. Dans la prolongement du Digital Clean Up Day, NWX a voulu étudier la faisabilité de réalisation d’un Escape Game thématique. Ce jeu devra permettre aux joueurs de se sensibiliser au numérique responsable et de réaliser des gestes concrets de nettoyage de données.

Mais plutôt que de se lancer tête baissée dans un développement, comment faire pour concevoir une solution qui sera effectivement adoptée et pertinente pour les enjeux liés au numérique responsable ? Et d’ailleurs, le numérique responsable, c’est quoi au juste et comment les professionnels sur le terrain s’approprient ou non cette notion ? 

À partir des questions posées, il a fallu aller chercher des données de qualité. Après avoir identifié des profils variés de professionnels, l’étude visait d’une part à comprendre les freins et les leviers à l’adoption de pratiques numériques responsables et d’autre part à explorer les mécaniques de jeu possibles à mettre en oeuvre. L’étude s’est déroulée entre le 13 novembre 2024 et le 10 mars 2025 et s’est appuyée sur trois types de données collectées : données secondaires de retours d’expérience, entretiens individuels avec des experts du numérique responsable, focus groupe portant sur l’idéation des mécaniques de jeu.

APPRENTISSAGES : 

I.

Une première découverte se trouvait du côté des experts du numérique responsable. Malgré la diversité de leurs parcours, de leurs approches et de leur spécialisation, ils étaient d’accord sur les orientations stratégiques à adopter pour ancrer dans la vraie vie les pratiques responsables. Les points divergents se trouvaient du côté du “comment”, c'est-à-dire de la méthodologie concrète de réalisation. 

Voici la stratégie proposée pour aboutir à un numérique responsable en 5 points  : 

1. Sensibilisation et éducation :

Tous les experts soulignent l'importance de la sensibilisation et de l'éducation pour promouvoir le numérique responsable. Les initiatives comme les ateliers, les jeux éducatifs, et les conférences sont souvent mentionnées comme des moyens efficaces pour engager les individus et les organisations.

2. Réduction de l'empreinte carbone :

La réduction de l'empreinte carbone est un objectif commun et consensuel. Les experts mentionnent la nécessité de limiter la consommation énergétique liée aux technologies numériques, notamment en optimisant l'utilisation des équipements et en réduisant les flux de données.

3. Engagement collectif :

L'importance de l'engagement collectif est mise en avant. Les initiatives de numérique responsable doivent être soutenues par l'ensemble de l'organisation, y compris les dirigeants et les collaborateurs, et concerner tous les métiers en interne.

4. Durabilité et réparabilité :

La promotion de la durabilité et de la réparabilité des équipements numériques est un thème récurrent. Les experts encouragent à prolonger la durée de vie des équipements et à favoriser leur réparation plutôt que leur remplacement.

5. Mesure et suivi :

La nécessité de mesurer et de suivre les impacts des actions de numérique responsable est soulignée. Les experts mentionnent l'importance de disposer d'indicateurs clairs pour évaluer les progrès et ajuster les stratégies.

En revanche, des questions et des discussions subsistent. Quelles approches fonctionnent le mieux ? Certains privilégient les jeux éducatifs et les ateliers interactifs, tandis que d'autres mettent l'accent sur les conférences et les présentations formelles, ou sur la refonte des process. Quels publics toucher pour maximiser la portée des actions :  les jeunes générations et les étudiants ou les entreprises et les collectivités ? Quels freins sont les plus forts : le manque de temps et de ressources ou le scepticisme et la complexité perçue ? Quel rôle jouent les motivations ? Elles varient ! Certains experts mettent en avant la fierté et la libération, tandis que d'autres soulignent la peur et l'anxiété liées au changement.

II.

La deuxième découverte est venue de l’enquête auprès des professionnels du numérique. Alors qu’on pouvait s’attendre à une flopée de propositions 100% tech, ceux et celles qui sont au contact quotidien des technologies digitales ont mis en avant la nécessité de prendre en compte la dimension humaine et émotionnelle. Les émotions jouent sur 6 tableaux : 

1. Attachement émotionnel aux technologies :

- Doudous numériques : Les individus sont souvent très attachés à leurs appareils numériques, les considérant comme des extensions d'eux-mêmes.

- Peur de la séparation : Se séparer de son téléphone ou de ses appareils numériques peut être perçu comme une épreuve émotionnelle difficile.

- Habitudes quotidiennes : Les appareils numériques font partie intégrante des routines quotidiennes, rendant difficile leur abandon ou leur utilisation modérée.

2. Peur et anxiété :

- Peur du changement : La crainte de changer ses habitudes numériques est souvent liée à l'anxiété de perdre des informations importantes ou de ne pas être à la hauteur des attentes sociales.

- Peur de l'inconnu : Le numérique responsable est perçu comme complexe et difficile à mettre en œuvre, ce qui décourage de nombreuses personnes.

- Peur de l'obsolescence : La peur de ne pas être à jour avec les dernières technologies ou de manquer des opportunités professionnelles ou sociales.

3. Perception et histoire personnelle :

- Perception de la complexité : Le numérique responsable est souvent perçu comme une discipline complexe et difficile à comprendre, ce qui peut freiner l'engagement.

- Histoire personnelle : Les individus ont des histoires personnelles et des perceptions uniques qui influencent leur rapport aux technologies numériques et à la sobriété.

- Perception de la sobriété : La sobriété numérique est souvent perçue comme une contrainte plutôt qu'une opportunité de simplifier la vie.

4. Émotions positives et motivations :

- Fierté et accomplissement : Réussir à adopter des pratiques de numérique responsable peut générer un sentiment de fierté et d'accomplissement personnel.

- Libération : Se libérer de la dépendance aux technologies numériques peut apporter un sentiment de liberté et de bien-être.

5. Émotions collectives et sociales :

- Pression sociale : La pression sociale pour posséder les dernières technologies ou pour suivre les tendances peut être un frein à l'adoption de pratiques responsables.

- Engagement collectif : Le sentiment d'appartenance à une communauté engagée dans le numérique responsable peut motiver les individus à adopter des pratiques durables.

- Responsabilité sociale : La prise de conscience de l'impact collectif des pratiques numériques sur l'environnement et la société peut encourager l'engagement individuel.

6. Émotions liées à la formation et à la sensibilisation :

- Émotions liées à l’apprentissage : La sensibilisation et la formation peuvent générer des émotions positives telles que la curiosité et l'enthousiasme pour le numérique responsable.

- Émotions liées à la prise de conscience : Prendre conscience des impacts environnementaux et sociaux des technologies numériques peut générer des émotions de culpabilité ou de responsabilité.

- Émotions liées à l'engagement : L'engagement dans des actions concrètes de numérique responsable peut générer un sentiment de satisfaction et de contribution positive.

Les émotions peuvent ainsi contribuer à l’adoption de nouvelles pratiques comme freiner le changement. La même personne peut ressentir tout leur spectre contradictoire !

ET LE JEU DANS TOUT ÇA ?

III.

Comment dès lors développer un jeu pour qu’il soit réellement utile à la problématique et ne devienne pas un potentiel “gadget à cocher les cases” ? 

Le jeu comme support à la mise en place de pratiques de numérique responsable peut s’appuyer sur 3 approches qui font consensus : sensibilisation - éducation ; engagement collectif ; mesure - suivi. Il peut apporter la dimension de sensibilisation, de formation et de simplification qui font partie des leviers. En outre, un jeu est une mécanique articulatoire. Il peut donc devenir un support pertinent pour aborder les multiples tensions par l’action vers la résolution créative. Face à la dimension émotionnelle des pratiques numériques, le jeu est particulièrement pertinent, la stimulation d’émotions en étant un des principaux ressorts. 

Mais un simple jeu ne pourra pas répondre à tous les défis ! Souvent vu comme une panacée, il n’en est pas une. Pour un développement véritablement utile, une ligne d’action claire et concrète a été proposée. 

D’une part s’appuyer sur ce qui a été validé par l’investigation qualitative : 

  • le principe d’un jeu est pertinent et désirable

  • le jeu est un vecteur approprié de sensibilisation et de formation

  • il devra comporter des éléments ludiques plaisants et des ressources formatives

  • il devra être hybride entre éléments physiques et numériques

  • le numérique apporte un intérêt pour cumuler et visualiser mais également pour renvoyer vers des ressources complémentaires formatives

  • la valeur du jeu sera dans son protocole d’animation, qui devra être adapté en fonction de la cible choisie

  • le protocole d’animation devra être différent si le jeu s’adresse à des professionnels en entreprise ou aux collectivités, les besoins étant différents

D’autre part cerner les zones de flou pour suivre les risques potentiels : 

  • la définition du numérique responsable demande à être clarifiée

  • le périmètre des thématiques à aborder devra être précisé

  • la cible idéale du jeu ou les cibles sont à clarifier

  • de nombreuses mécaniques de jeu ont été proposées, elles restent à tester

  • les ressorts émotionnels possibles pour le jeu sont nombreux mais restent à tester


Un tel diagnostic préalable va à l’encontre du désir d’agir tout de suite avec un maximum d’impact. Le fait de prendre du temps pour poser les bonnes questions, envisager les leviers possibles et souhaitables, écarter les complexités inatteignables peut paraître contre intuitif. Pourtant toute bonne conception est une conception “by design”, qui articule le fond et la forme, les objectifs et les moyens. Se poser les bonnes questions en amont tant que tout est encore possible permet de périmétrer correctement le projet.

Découvrez comment j’accompagne vos idées vers leur réalisation :